Communautés locales et drogues: réponses sanitaires et sociales

Aperçu général

Éléments clés

Les communautés locales sont importantes pour les réponses aux problèmes de drogue, car elles permettent d’encourager l’engagement et l’action civiques à partir de la base. En Europe, les municipalités et les pouvoirs locaux sont souvent les principaux moteurs de l’élaboration et de la mise en œuvre des stratégies. Ici, le terme «communauté» est utilisé pour désigner un groupe de personnes partageant un cadre géographique et administratif commun ou le lieu où elles vivent. Les communautés peuvent participer aux réponses aux problèmes de drogue de différentes manières:

• en tant que population ou milieu confronté à certains défis liés à la drogue, tels que les lieux ouverts de consommation ou les crimes liés à la drogue;
• en tant que population ou lieu où sont mises en œuvre des actions visant à remédier à des problèmes et à des dommages spécifiques;
• en tant que groupe participant à l’évaluation et à la planification des réponses locales aux problèmes de drogue (participation de la communauté).

Réponses

La manière dont les réponses communautaires sont définies varie d’un pays européen à l’autre; toutefois, elles peuvent inclure:

• des plans de lutte contre la drogue au niveau de la communauté ou de la ville afin de coordonner les activités en fonction des besoins locaux;
• les approches de participation communautaire, telles que les coalitions locales où les membres de la communauté participent activement au diagnostic des problèmes liés à la drogue et à la réponse à ces problèmes;
• les stratégies locales de prévention environnementale, qui fournissent des environnements plus sûrs et plus sains, en particulier pour les jeunes;
• des services de proximité pour les individus et les groupes qui ne sont pas facilement accessibles par des services sur site fixe ou par les canaux traditionnels de promotion de la santé;
• des activités de diversion pour les jeunes au sein de la communauté, qui visent à renforcer les facteurs de protection et à proposer des alternatives à la consommation de drogues pour les jeunes vulnérables;
• des programmes visant à remédier aux dommages liés à la drogue subis par la communauté, par exemple des programmes de nettoyage pour la collecte des aiguilles et la mise à disposition de salles de consommation de drogues.

Panorama européen

La cartographie systématique des interventions communautaires liées à la drogue en Europe est limitée. La diversité des différents types d’interventions, leur mise en œuvre au niveau local et le fait qu’elles recoupent souvent des activités plus larges de santé publique et de prévention de la criminalité rendent difficile le suivi de ces interventions.

Des approches de prévention ciblant les quartiers à haut risque sont mises en œuvre dans certains pays, qui appliquent de nouvelles méthodes, comme le réaménagement des espaces urbains. Ce type d’intervention est, selon les données transmises, le plus souvent proposé dans le nord et dans l’ouest de l’Europe.

L’approche Communities That Care (CTC) (programme «des communautés qui se sentent concernées») est utilisée dans un certain nombre de pays, tout comme Planet Youth (souvent connu comme le modèle islandais), bien que ce dernier programme doive encore être évalué dans l’Union européenne.

Principaux problèmes liés à la consommation de drogues et aux communautés

La compréhension de la «communauté» et des actions connexes varie d’un pays européen à l’autre. Dans certains cas, les communautés peuvent être définies par des limites géographiques, soit de façon informelle, comme dans le cas des quartiers, soit de façon plus officielle par des frontières municipales ou des délimitations administratives locales. Dans d’autres cas, elles peuvent se définir à travers les caractéristiques ethniques, linguistiques ou culturelles partagées par leurs membres.

Quelle que soit la définition retenue, les communautés sont confrontées à une série de dommages liés à la consommation de drogues, par exemple des problèmes liés aux lieux ouverts de consommation locaux. Elles peuvent également jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre les problèmes de drogue en encourageant l’engagement et l’action civiques à partir de la base. Il est important de noter que les municipalités et les autorités locales sont souvent les principaux moteurs et parties prenantes de l’élaboration de stratégies et de la mise en œuvre des interventions.

Le terme «communauté» est défini ici comme un groupe de personnes partageant un cadre géographique et administratif commun ou le lieu où elles vivent. Les interventions au sein d’une communauté ne s’adressent pas nécessairement à l’ensemble de la communauté en question, mais peuvent concerner plusieurs acteurs clés (associations ou groupements familiaux, services de santé, écoles et infrastructures sportives, par exemple).

La participation de la communauté aux réponses aux problèmes de drogue peut se manifester de différentes manières:

• en tant que population ou milieu confronté à des défis spécifiques liés à la drogue, tels que des scènes de drogues ouvertes ou des crimes liés à la drogue;
• en tant que population ou lieu dans lequel des actions visant à remédier à des problèmes et à des dommages spécifiques peuvent être mises en œuvre;
• en tant que population participant à l’évaluation et à la planification des réponses locales aux problèmes de drogue (participation de la communauté) – celles-ci s’attaqueront généralement aux dommages au niveau de la communauté.

Preuves et réponses aux problèmes liés aux drogues et aux communautés

Les plans communautaires de lutte contre la drogue constituent un mécanisme important pour traduire les politiques et stratégies nationales en réponses appropriées pour répondre aux besoins locaux. Le niveau d’élaboration de ces plans variera d’un pays à l’autre, en fonction de leurs structures et responsabilités administratives. Le fait d’associer les consommateurs de drogues et les communautés locales aux processus de consultation permet de s’assurer que les plans s’appuient dans une plus large mesure sur la situation locale. Elle peut également contribuer à réduire la stigmatisation des consommateurs de drogues et à promouvoir la compréhension entre les différents membres de la communauté.

Les communautés en tant que cadre d’intervention

Les communautés sont des cadres importants pour les stratégies locales de prévention à composantes multiples et environnementales, qui fournissent des environnements plus sûrs et plus sains, en particulier pour les jeunes. Les actions environnementales sont spécifiquement conçues pour modifier le contexte dans lequel les personnes prennent des décisions et soutiennent des choix plus sains. Ces actions peuvent agir sur l’environnement physique, par exemple en limitant la disponibilité de l’alcool, des produits du tabac et d’autres substances et l’accès à ceux-ci, et sur l’environnement social, en renforçant les normes et les attitudes de non-consommation.

Certaines actions de développement communautaire ou activités de diversion pour les jeunes au sein de la communauté se concentrent sur le renforcement des compétences de la vie courante et de l’estime de soi par l’offre d’une série d’activités (dans des domaines tels que le sport, la musique ou les projets créatifs et le volontariat). Elles visent à renforcer les facteurs de protection et à réduire les facteurs de risque, ainsi qu’à offrir aux jeunes vulnérables des alternatives à la consommation de substances, à la criminalité et à la participation à des gangs.

Les services de proximité au niveau local peuvent constituer une composante importante des stratégies locales de prévention de la toxicomanie et de réduction des dommages pour les groupes vulnérables. En général, l’objectif est ici d’établir des contacts avec des personnes et des groupes difficiles à atteindre par l’intermédiaire de services fixes ou de canaux traditionnels d’éducation à la santé. L’objectif général des travailleurs de proximité est d’établir des contacts et des relations avec les populations cibles et d’être acceptés en tant que sources d’informations et de conseils fiables et bien informés. Ces services se présentent sous diverses formes et peuvent être dirigés par des travailleurs sociaux ou par des pairs ayant suivi une formation. Les groupes cibles peuvent aller des jeunes, abordés dans la rue ou dans des fêtes, aux consommateurs de drogues à haut risque et aux travailleurs du sexe. Les interventions menées par les pairs doivent être particulièrement bien appuyées par des bonnes pratiques en matière de gestion. Les questions relatives à la confidentialité, à la définition et au respect des limites, ainsi qu’à la protection de la santé et de la sécurité des membres du personnel sont des préoccupations essentielles des services qui travaillent dans ce domaine. Ces priorités sont étayées par l’établissement de lignes directrices claires couvrant les objectifs, les services proposés, les responsabilités et la nécessité de reconnaître et de respecter les frontières personnelles, professionnelles et juridiques.

Réponses aux préjudices subis par les communautés

Les initiatives visant à lutter contre les dommages, les nuisances et les préoccupations en matière de sécurité au sein de la communauté comprennent la mise en place de lignes téléphoniques, soutenues par des campagnes médiatiques connexes, afin de permettre le signalement anonyme du trafic de drogue dans les quartiers, ainsi que des programmes proactifs, tels que l’organisation de journées d’action pour nettoyer les parcs ou les zones où les déchets liés à la drogue posent un problème. Le Drug Related Intimidation Reporting Programme en Irlande est un exemple d’initiative qui aide les membres de la communauté victimes d’intimidation en raison de leurs dettes liées à la drogue.

Plus généralement, les services de réduction des dommages peuvent apporter des avantages directs aux communautés en plus de leurs objectifs principaux. Par exemple, les programmes d’échange d’aiguilles et de seringues peuvent réduire les déchets liés à la drogue, tandis que les salles de consommation de drogues, en offrant des espaces plus sûrs où les gens peuvent consommer de la drogue, peuvent potentiellement réduire les dommages pour les communautés associés à l’injection publique de drogues (voir également l’encadré «Éclairage... les salles de consommation de drogues»). Toutefois, il peut y avoir une résistance locale à la mise en place de certains de ces services, de sorte que l’engagement de la communauté est important pour qu’ils soient efficaces.

Mobilisation communautaire

Des coalitions communautaires peuvent être mises en place pour coordonner une série d’activités et de ressources destinées à prévenir la consommation de substances et les dommages connexes chez les jeunes, souvent en utilisant une approche ascendante. Ces groupements peuvent rassembler diverses parties prenantes de la communauté pour atteindre un objectif commun et mobiliser les communautés pour participer aux initiatives de prévention et de promotion de la santé.

L’initiative d’évaluation et de réponse rapides en Norvège engage les communautés locales à travailler ensemble pour trouver leurs propres solutions aux défis locaux associés aux problèmes et aux dommages liés à la consommation de drogues. L’approche Communities That Care (CTC) part du principe que la prévalence des problèmes de santé et de comportement des adolescents dans une communauté peut être réduite en repérant les facteurs de risque forts et les facteurs de protection faibles chez les jeunes de cette communauté. Cela permet ensuite de choisir des programmes de prévention et d’intervention précoce éprouvés et efficaces pour aborder ces facteurs de risque et de protection spécifiques.

Bien que des études sur l’efficacité de l’approche modèle CTC aient été menées principalement aux États-Unis, des expériences de mise en œuvre en Europe émergent à présent et il est nécessaire de poursuivre les recherches d’évaluation en tenant compte du processus d’adaptation et de la fidélité du programme. L’incidence des différents contextes de mise en œuvre doit être évaluée systématiquement dans plusieurs sites et pays afin d’améliorer la qualité des futures mises en œuvre (voir la page des ressources de mise en œuvre de l’EMCDDA).

Planet Youth, également connu comme le modèle islandais, applique un diagnostic local similaire des facteurs de risque et de protection tout en favorisant un engagement ascendant des acteurs communautaires, mais elle ne propose pas d’ensemble d’interventions prescrit. À l’heure actuelle, les seules évaluations de cette approche en Europe ont eu lieu en Islande.

Panorama européen: la disponibilité des interventions communautaires

Des approches de prévention ciblant les quartiers à haut risque sont mises en œuvre dans certains pays, qui appliquent de nouvelles méthodes, comme le réaménagement des espaces urbains. L’offre pour ces types d’interventions serait la plus élevée dans le nord et l’ouest de l’Europe (voir les graphiques). Des approches dont l’efficacité a été démontrée de manière satisfaisante ont été mises en œuvre dans un tiers des pays européens, dont la moitié font état à la fois de restructurations environnementales (actions qui visent à faciliter les comportements souhaités en modifiant les contextes physiques et sociaux) et de programmes qui font l’objet de pressions et de restrictions normatives (fixation de normes et de règles, et limitation des possibilités).

Communities That Care est une approche de prévention axée sur le voisinage mise en œuvre en Croatie, en Allemagne et aux Pays-Bas. De plus, la Belgique mène actuellement une étude sur l’utilisation de cette approche pour prévenir la délinquance. Un programme similaire, utilisé pour la première fois en Islande dans le cadre de sa stratégie visant à réduire la consommation de substances chez les jeunes, Planet Youth (également connu comme le modèle islandais), a été mis en œuvre dans de nombreux pays européens.

Néanmoins, la collecte systématique d’informations sur les interventions communautaires reste limitée. La diversité des différents types d’actions décrits ci-dessus et le fait qu’elles soient, par nature, souvent menées et mises en œuvre au niveau local les rendent difficiles à surveiller. En outre, bon nombre de ces activités communautaires peuvent s’inscrire dans le cadre d’activités plus vastes de santé publique et de prévention de la délinquance, voire recouper de telles initiatives. Le partage des bonnes pratiques peut s’effectuer par l’intermédiaire de réseaux, qui peuvent avoir une portée plus large, être spécifiques à un type d’action ou couvrir différentes zones géographiques. Citons par exemple Communities That Care EU, le Réseau international des salles de consommation de drogues, le Nightlife Empowerment & Well-being Network (NewNet) et Club Health. La cartographie de ces réseaux et l’obtention d’une compréhension plus claire des différentes approches adoptées en Europe pour différents types d’actions au sein des communautés peuvent constituer un point de départ utile pour améliorer le partage des bonnes pratiques et le suivi de l’offre.

Plusieurs pays européens disposent de registres nationaux de programmes de prévention fondés sur des preuves scientifiques. Au niveau européen, le registre en ligne Xchange des programmes de prévention fondés sur des preuves scientifiques joue un rôle central. Il présente des actions dont les études d’évaluation européennes démontrent qu’elles ont des résultats prometteurs en matière de consommation de substances. En plus de fournir des informations sur l’efficacité des programmes, le registre offre également un aperçu des expériences des professionnels qui ont mis en œuvre ces programmes dans différents pays européens. Cela permet aux décideurs d’évaluer la facilité avec laquelle les programmes peuvent être mis en œuvre dans différents contextes sociaux, culturels et organisationnels. Il aide également les professionnels de la prévention à élargir leur base de connaissances tout en interagissant les uns avec les autres sur leurs expériences de ces programmes.

Implications pour les politiques et les pratiques

Éléments de base

Les interventions en matière de drogue au sein des communautés comprennent:

• l’élaboration de politiques et d’interventions en matière de drogue visant à remédier aux nuisances et aux dommages subis par les communautés;
• la participation des communautés à la mise en œuvre des services, tels que les programmes de prévention de la toxicomanie à composantes multiples;
• les activités de prévention environnementale et la sensibilisation des personnes qui ne participent pas aux services.

Perspectives

• La mobilisation communautaire peut garantir que les services sont adaptés aux besoins locaux et soutenus par la population locale.
• Dans certaines régions, la mise à disposition de salles de consommation de drogues, de programmes d’échange d’aiguilles et de seringues ou d’autres mesures de réduction des dommages pourraient être envisagées afin de réduire les nuisances causées par les lieux ouverts de consommation.

Lacunes

• Les informations sur l’ampleur et la nature des services de lutte contre les dommages subis par les communautés et leur incidence sont limitées.
• Il existe très peu d’éléments de preuve de l’efficacité des interventions communautaires, et des recherches supplémentaires dans ce domaine seront importantes.

Données et graphiques

Cette infographie, élaborée pour accompagner le miniguide Local communities and drugs: health and social responses (Communautés locales et drogues: réponses sanitaires et sociales) présente des statistiques sur les interventions dans les quartiers à haut risque.

 

Évaluations basées sur l’avis d’experts recueillies dans le cadre d’une enquête structurée de l’EMCDDA. Aucune offre: n’existe pas. Offre rare: disponible uniquement dans quelques endroits pertinents. Offre limitée: disponible dans plus de quelques endroits où cela est pertinent (mais pas dans la majorité). Offre étendue: disponible dans la majorité des endroits où cela est pertinent (mais pas dans la quasi-totalité). Offre complète: disponible dans presque tous les lieux pertinents.

 

Évaluations basées sur l’avis d’experts recueillies dans le cadre d’une enquête structurée de l’EMCDDA. Information (apprentissage par la lecture et l’écoute); éducation (apprentissage par l’observation, l’expérience et l’interaction); formation (acquisition d’aptitudes et de compétences, apprentissage par la pratique); établissement de normes (cadres, normes et règles, limitation des possibilités); restructuration environnementale («architecture de choix» qui facilite les comportements souhaités en modifiant les contextes physiques et sociaux); mise en place d’incitations (fourniture d’incitations pour les comportements souhaités).

Autres ressources

EMCDDA

• Salles de consommation de drogues.
• Portail des bonnes pratiques – base de données des éléments probants.
• Registre de prévention Xchange.
• Drug prevention: exploring a systems perspective, Rapport technique, 2019.
• Communities That Care (CTC): a comprehensive prevention approach for communities, 2017.
• Salles de consommation de drogues: aperçu de l’offre et des preuves, 2018.

À propos de ce miniguide

Ce miniguide donne un aperçu des éléments à prendre en considération lors de la planification ou de la mise en œuvre de réponses sanitaires et sociales aux problèmes liés aux stimulants dans les communautés locales, et examine les interventions disponibles et leur efficacité. Il examine également les implications pour les politiques et les pratiques. Ce miniguide fait partie d’un ensemble plus vaste, qui comprend ensemble des réponses sanitaires et sociales aux problèmes de drogue: un guide européen.

Cette publication doit être référencée comme suit: Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (2022), Local communities and drugs: health and social responses (Communautés locales et drogues: réponses sanitaires et sociales), https://www.emcdda.europa.eu/publications/mini-guides/local-communities….

Éléments d’identification

HTML: TD-06-22-055-FR-Q
ISBN: 978-92-9497-698-7
DOI: 10.2810/350353